Recette d'une médaillée au France Bière Challenge 2020 !
Après avoir brassé plusieurs IPA, pale ales, IPA sans alcool, session IPA ou encore des double IPA DDH, on a voulu continuer à explorer la famille des IPA et créer une bière très moelleuse, gourmande et super aromatique. Une bière quelque part entre le jus de mangue et l'IPA.
C'est en explorant cette piste qu'on a créé Caresse Gourmande. Une base d'IPA brassée avec du blé malté et en flocons, une levure type "New England" et puis on a fait deux houblonnages à cru. C'est une New England IPA DDH !
Les puristes pourront remarquer que, d'après le BJCP et le guide des styles de la Brewers Association, on est un poil en dessous de la limite basse au niveau de l'alcool et de l'amertume. C'est vrai. Mais c'est comme ça qu'on aime nos bières aux Cuves de Fauve !
Le France Bière Challenge, c'est une des compétition de bière les mieux organisées en France. Les bières sont triées par catégories et les jurys sont des professionnels de la bière. On avait inscrit quelques bières au concours et on a gagné 4 médailles, dont 3 en or. Caresse Gourmande avait obtenu l'or dans la catégorie IPA de spécialité, qui regroupe les New England, les Wheat, les black ou encore les brut IPA.
Qui a trouvé le nom ? On se souvient plus très bien, mais ce qui est certain c'est que ça a beaucoup intrigué nos clients aux Cuves de Fauve !
Notes de dégustation :
Caresse Gourmande, c'est évocateur non ? Des fruits exotiques et du houblon À FOND comme dans toute IPA DDH qui se respecte. Moelleuse et charnue comme les IPA au blé. Douce et peu amère dans le style New England/East Coast.
Si vous voulez jouer les américains, vous pouvez la décrire en disant qu'elle est hazy et juicy !
Matériel :
On a fait beaucoup d'essais avec un Braumeister 20L, la recette et les calculs sont adaptés pour ce type de matériel. Si vous voulez des tips pour l'adapter à votre système, hésitez pas à nous envoyer un message avec votre question ou à passer nous voir aux Cuves !
Les specs :
Volume en bouteille : 20 L
Efficacité / rendement : 70%
OG : 1,055 / 13,5°Plato
FG : 1,016 / 4°Plato
IBU : 25
ABV : 5,2%
EBC : 6
Les céréales :
3,50kg Malt Pilsner (64%)
1,25kg Malt de blé clair (23%)
0,75kg Flocons de froment (12%)
Le houblonnage :
40g de Mosaic pendant le WP à 85°C
40g de Idaho 7 pendant le WP à 85°C
30g de Mosaic en houblonnage à cru 72h après l'ensemencement
30g de Idaho 7 en houblonnage à cru 72h après l'ensemencement
70g de Mosaic en houblonnage à cru 10j après l'ensemencement
70g de Idaho 7 en houblonnage à cru 10j après l'ensemencement
La levure :
Lallemand LalBrew New England East Coast Ale
Recette :
Empâtez avec 20L d'eau et maintenez à 69°C pendant 60 minutes.
Montez en température jusqu'à 78°C et maintenez 10 minutes.
Recirculez jusqu'à ce que le moût soit clair, puis rincez avec 13L d'eau.
Vous devriez avoir autour de 27L au début de l'ébullition avec une densité de 1,050 (12,5°P).
Faites bouillir pendant 1h et profitez en pour vous relaxer. Il n'y a rien à faire car on n'a pas houblonné cette bière pendant l'ébullition ! Vous devriez avoir autour de 24L avec une densité de 1,055 (13,5°P).
En fin d'ébullition refroidissez le moût à 85°C avant de faire votre whirlpool. Houblonnez généreusement en suivant les quantités et laissez reposer 30 minutes. Compte tenu des grosses quantités de houblon, c'est important de refroidir votre moût, sinon vous aurez beaucoup trop d'amertume !
Enfin, refroidissez votre bière à 20°C, transférez dans un fermenteur propre et stérilisé et ensemencez avec un sachet de levure. Chez nous, on ne réhydrate pas les levures pour des bières de ce niveau de densité. Vous devriez avoir autour de 22L dans votre fermenteur.
Laissez fermenter 3 jours à 20°C puis faites votre premier houblonnage à cru. Une semaine plus tard, faites le second houlonnage. Laissez 4 jours de plus à 20°C puis refroidissez le plus proche possible de 0°C, et laissez reposer 3 jours.
Ensuite, embouteillez ou enfutez en visant 2,5 volumes de CO2 (autour de 5,0g/L de CO2).
Nos tips !
Si on avait un seul conseil à vous donner, c'est de traiter cette bière avec précaution. Les bières très houblonnées sont très fragiles. Leur pire ennemi : l'oxygène contenu dans l'air. Lors de vos DH, ouvrez le couvercle, versez vos houblons d'un trait et refermez aussitôt. Ouvrez le couvercle le moins souvent possible, ne transférez pas votre bière entre la fermentation "primaire" et "secondaire". Enfin, faites attention à ne pas faire d'éclaboussures lorsque vous sucrez votre bière, juste avant la mise en bouteille.
Ensuite, lors de la mise en bouteille, remplissez jusqu'à ras bord. Oui, le plus possible. Le moins il y a d'air dans la bouteille, le moins il y aura d'oxygène. Allez faire un tour sur le site génial Happy Beer Time si vous n'êtes pas convaincus !
Enfin, dès que vos bouteilles ont une carbonatation acceptable, mettez TOUT le lot au frigo. Ça prend de la place, on sait, mais c'est la seule façon de ralentir le processus de vieillissement. Et buvez vite.
Vous avez remarqué qu'on faisait l'empâtage à haute température. L'idée c'est d'avoir un maximum de corps sur cette bière, qu'elle soit bien moelleuse. Ne soyez pas surpris de la densité élevée de votre bière en fin de fermentation !
Nous, on vous conseille de ne pas utiliser de chaussette à houblon. Le houblon s'exprime mieux quand il est libéré, délivré. On vous conseille de ne pas transférer pour "enlever" le houblon du premier DH. Oui, vous le laisserez pendant toute la fermentation et jusqu'à la fin. Est ce que vous risquez d'extraire des tannins et d'avoir un hop burn ? La réponse est peut-être. Mais c'est bien meilleur qu'une bière oxydée.
Ne soyez pas surpris si votre bière est très trouble : vous avez mis du blé, des flocons, une levure qui sédimente peu et beaucoup de houblons. En revanche, faites attention à ne pas transférer de "morceaux" de pellet de houblon. Vous risquez d'avoir des bouteilles qui gushent sinon.
Pour ceux qui veulent aller une étape plus loin dans la maitrise du brassage, c'est un style de bière qui mérite de s'attarder un peu sur votre eau. Essayez de viser 150ppm (mg/L) chlorure et 75ppm (mg/L) de sulphate. Vous pouvez même vous laisser tenter par une pincée de fleur de sel.
15 commentaires
Salut Lilian,
Merci pour ton message !
Trop bien que tu te lances dans le brassage de nos recettes ! Tu nous diras ce que tu en penses.
Pour répondre à tes questions :
- Pas besoin de recirculer, tu vas perdre quelques degrés, c’est pas grave. L’isomérisation et donc le gain d’amertume commence autour de 80°C, certains visent 79°C pour leur addition de houblon hors flamme pour avoir le moins d’amertume possible. 85°C c’était le niveau amertume / aromatique qui nous plaisait le mieux à nous. Si tu commences un peu au dessus et que tu finis un peu en dessous le différence sera minime !
- Aux Cuves de Fauve, on refroidit à la température cible, on met en route la pompe pour faire le tourbillon pendant 5 minutes puis on laisse reposer 20 min avant de transférer en fermenteur. Le houblon est versé lorsqu’on démarre la pompe. En amateur, je n’avais pas de matos pour faire un WP, car j’avais un refroidisseur en serpentin dans la cuve. Je versais le houblon à la température cible, j’attendais le temps voulu (20 ou 30min) puis je reprenais le refroidissement. C’était plutôt un “hop stand” qu’un “houblonnage au whirpool”.
- Nous, on n’a jamais eu de problème d’oxydation à chaud lors du whirpool, j’imagine qu’il faut vraiment faire des gros splashs pour oxyder la bière à chaud…
- Tu peux être tranquille pour tout ce qui touche aux contaminations tant que tu es au dessus de 60°C. En revanche, oui, il faut aller très vite, surtout dans la zone 20°C-60°C, zone dans laquelle les bactéries se développent très vite, et plus vite que les levures.
Est ce que ça te semble clair ?
Bon brassin et tiens nous au courant !
Bonjour la Team Fauve,
Merci pour le partage de cette recette, que je m’apprête à brasser !
J’ai une question sur le Whirlpool. Il faut donc arrêter l’ébullition et passer le mout à 85°C puis ajouter les houblons.
Questions :
- Doit-on recirculer pour garder 85°C pendant 30minutes? (compliquer avec le WP…) ou peut-on se permettre de perdre des °C ?
- Pendant combien de temps fait-on le WP ? 2/3 minutes et on le laisse le vertex tourner ?
- N’y a-t-il pas un risque d’oxygénation du mout chaud (HSA : Hot Side Aeration) ?
- Et enfin, ce qui me fait le plus peur : n’y-a-t-il pas un risque d’infection ? on dit toujours qu’il faut refroidir le plus rapidement possible.
PS: J’utilise un GF 30
Merci d’avance pour vos réponses.
Bonne continuation à vous et j’espère à bientôt au brewpub !
Lilian
Hello Pierrick,
Bonne année !
Tu touches un sujet super sensible : l’évolution d’une bière une fois conditionnée. C’est un des challenges majeurs pour les brasseries pros, et donc forcément ça l’est aussi pour les amateurs.
Pour les bières houblonnées, le houblon est au maximum de sa fraicheur quand la bière est en fermenteur.
Tout ce qui se passe après la sortie du fermenteur va abimer une NEIPA, et c’est ce qui nous a poussé à ouvrir un brewpub et à servir la bière directement depuis les cuves ! Si tu passes à Paris (et que les bars ré-ouvrent un jour), on te fera goûter la différence !
Il y a quelques astuces pour limiter ou ralentir l’évolution d’une NEIPA, mais dans tous les cas, elle sera moins bonne après quelques mois.
D’abord, il faut que tu sois sur de l’hygiène de ton process d’embouteillage : une contamination peut faire baisser le corps de ta bière et changer le profil des tes houblons.
Ensuite, il faut que tu fasses attention à la quantité d’oxygène dissous dans ta bière. Ça commence avant l’embouteillage : ne pas faire de transfert entre la fermentation “primaire” et “secondaire” et ne pas ouvrir ton fermenteur pendant la fermentation, sauf pour les DHs, Pendant l’embouteillage, il faut que tu transfères en cuve de sucrage ou que tu sucres sans faire de “splash”, il faut être super délicat. Ensuite essaie de remplir les bouteilles à ras bord, ça limitera la quantité d’air dans la bouteille.
Attention, quand on dit que la levure va manger l’oxygène pendant la refermentation et que donc que ça ne craint rien se trompent. Les réactions chimiques d’oxydation du houblon vont commencer très rapidement et sont irréversibles.
Enfin, après embouteillage, dès que la refermentation est terminée, garde tes bouteilles au frais. Idéalement au frigo, sinon à la cave.
Mais dans tous les cas, une NEIPA est meilleure jeune, et les meilleurs brasseurs du monde conseillent de boire leurs IPAs dans les deux mois après le conditionnement !